Histoire : Lylia

Je décidai de raconter mon histoire à un jeune garçon qui prétendait vouloir devenir écrivain.
Je ne sus qu'après que ces confessions ne servirent qu'à renforcer les convictions de ceux qui méprisaient déjà la noblesse...

Je suis née il y a 21 ans, dans la rue. Rue que je n'aurai pas vue longtemps puisque mes parents furent enlevés - ou tués - par des brigants. Je fus recueillie par un couple de nobles alors que je n'avais que quelques jours. Je ne rappelle évidemment pas cette histoire, mais elle me fut contée par ceux qui m'ont élevée.
J'ai toujours grandi dans le luxe et l'opulence et n'ai jamais même soupçonné la misère qu'avait connue mes parents.
J'ai reçu un enseignement en lettres et en arithmétique par un précepteur qui me chôyait comme si j'étais sa propre fille.
Lorsque je me promenais en ville, il me plaisait de donner quelques pièces à des mendiants. Je lisais dans leurs yeux la gratitude alors que pour moi, ces quelques pièces ne représentaient presque rien. Elles m'étaient dues, comme tout le reste d'ailleurs. Mais j'aimais regarder ces gens, ils me rappelaient les bêtes en cage que nous avions au palais. A la différence qu'eux, leur cage n'était pas faite d'acier mais de misère.
Mon enfance fut heureuse et pleine de promesses. Celle de m'instruire davantage, de trouver un mari quand j'en aurai l'âge. J'arrêtai toutefois les études à l'âge de 20 ans pour me consacrer aux arts de la cuisine, de la couture et de toutes les choses qu'une dame de mon rang doit être capable de faire pour répondre comme il se doit aux besoins de son époux.
"Une femme n'a pas besoin d'être particulièrement intelligente, mieux vaut qu'elle soit serviable et bonne pour son homme". Ces paroles de ma mère m'avaient longtemps laissée dans la confusion, et puis je m'étais résignée. Je n'ai jamais eu un caractère très fort, n'ai jamais cherché à m'affirmer. Je prends ce que la vie me tend.
D'ailleurs, cette phrase de ma mère me rappelait les quelques vers d'un poète que j'avais pu lire :

"Elle n'avait pas de tête,
Elle n'avait pas l'esprit beaucoup plus grand qu'un dé à coudre
Mais pour l'amour on ne demande pas
Aux filles d'avoir inventé la poudre"

Cependant, toutes ces promesses s'écroulèrent brutalement lorsque mon père m'annonça mon "départ pour le monde". Il me dit qu'il fallait que je fasse mes propres choix, que je voie le monde de mes propres yeux, que je sorte de mon cocon. Bien sûr, il ne me fermait pas la porte au nez mais voulait que je passe au moins un an hors du nid pour être sûre que la vie à laquelle j'étais destinée était bien celle que je désirais.

C'est ainsi que je partis pour la Vallée de la Reine...